Bavard’âge …ou conscience qui s’aiguise?… 1/2

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vieillard expérience évolutionQuel âge vous sentez-vous d’avoir: celui de votre carte d’identité?… celui des amis nés à peu près en même temps que vous?… un autre âge?…

Faire changer jusqu’à son âge officiel!…

Dans un article titré «Êtes-vous fluides?» (1), Richard Martineau attrape au vol une anecdote peu banale : 

«Aux Pays-Bas, un homme de 69 ans s’est rendu devant les tribunaux pour faire changer sa date de naissance sur tous ses documents officiels.»
→  Son plaidoyer : ‘’J’ai 69 ans, mais dans ma tête, je me sens comme si j’en avais 49. Si on peut changer son nom et son genre, pourquoi ne pourrais-je pas faire changer mon âge?’’

Que vous disent vos réactions réflexes?…

Si vous êtes dans la fleur de l’âge, vous arrive-t-il de réagir vivement quand on vous dit que telle activité, telle fonction, n’est pas encore pour un jeune comme vous?… Ou si vous êtes presque au soir de la vie, vous surprenez-vous à penser ou à dire à quelqu’un d’autre «…Ah! ça, ce n’est plus pour moi…» ou à baisser les bras entre amis devant un café, à reconnaître que… vous avez pris votre carte de membre du Club des T’as-mal-où ?…

De quoi dépend la conscience d’un âge?

Richard Martineau propose comme hypothèses d’explication : «Ça dépend de votre bagage génétique, de la vie que vous menez, de votre position sociale. Pour certains individus le temps s’écoule lentement, alors que pour d’autres il file à la vitesse de la lumière.»
Hmm… J’ai sursauté en lisant l’article. Ça résonne en moi comme un sentiment de fatalité, comme si la vie était une mécanique implacable, qu’il est puéril de vouloir déjouer…

Est-ce que notre vision du temps qui passe pourrait être plus malléable, dépendre aussi de notre état d’esprit?…

Mon expérience

Je m’intéresse à cette question de l’âge et du vieillissement depuis plusieurs années. Mes études en sociologie m’avaient familiarisé avec le rôle-clé des modèles  de comportement : nos attitudes autant que nos actes sont largement conditionnés par les moules de conduite et d’interprétation proposés par notre communauté d’appartenance.
À mesure que j’étudiais, toutefois, j’en prenais le contrepoids, pour m’intéresser aux attitudes des gens qui refusaient le modèle prêt-à-penser prescrit par leur groupe social ou culturel. Certains placent leur recherche du sens dans l’adaptation à l’entourage, c’est correct pour eux; d’autres le situent dans le désir d’affirmer leur singularité face à la tribu, ça fait du sens aussi…

J’ai toujours eu un mouvement naturel pour aussi bien m’asseoir par terre avec les tout-petits, me rouler dans la neige avec mes enfants plus grands, ou marcher au pas d’un aîné qui me raconte quelque chose de sa vie. Ça m’est peut-être plus facile, du coup, de prendre mes distances d’un moule conditionné par l’âge. Je me suis peu à peu convaincu que j’avais là une part de liberté — si je le décidais:
«…J’ai moins d’énergie qu’avant et moins de santé, c’est une fait. Soit je l’entretiens dans ma tête et m’en afflige, et alors ça peut juste accélérer mon processus de vieillissement.
Soit je donne sa chance à ma capacité d’influencer le processus, et si ça fonctionne j’arriverai à le ralentir, peut-être même à l’inverser sur certains plans…»
Pour prendre un langage forestier cher aux Québécois, pourquoi rajouter du bois dans un feu que je ne veux pas voir brûler?…

J’ai alors peu à peu opté pour remplacer une vision de temps-qui-fuit  par une vision de vitalité-qui-se renouvelle. D’abord je me suis regardé aller dans la façon dont je me parle de l’âge, ou dans mes conversations avec d’autres sur le sujet. J’ai décidé de refuser de croire que certaines expériences n’étaient plus pour moi, ou qu’il fallait me résigner à voir ma peau pendre sur la corde-à-linge que devient mon corps: «…j’ai mon âge, mais je ne suis pas cet âge…».

Voilà bien une trentaine d’années que je pratique cette fidélité à mon option. Régulièrement des gens sont surpris d’apprendre mon âge. Moi-même j’ai souvent constaté que certains traits de mon visage, certains mouvements du corps, deviennent comme hors-d’âge. Sans doute parce qu’ils sont directement branchés sur le coeur plutôt que sur un calendrier. Et quand les gens vous sentent en harmonie, c’est fou comme ils oublient votre âge …et vous le font oublier.
J’aime blaguer. De date plus récente, quand des gens me questionnent sur mon âge, il m’arrive de leur demander «Voulez-vous la vérité?…. Le seul calendrier dont je sois sûr, c’est celui de l’éternité. Les autres je les connais, mais je n’en suis pas certain… » Leur visage devient tout sourire. Avec ce gallon à mesurer, ils ont tout ce qui leur faut pour me trouver bien jeune encore…

Et quand certains symptômes volent la vedette?…

Attention! ça ne va pas tout seul de tenir bon dans cette attitude. Je repense tout d’un coup à cette artiste vedette à qui on demandait ce que ça lui faisait de vieillir. Elle a répondu qu’elle s’y apprivoisait bien en général — avec une exception, qu’elle commentait sur un ton charmant: c’est lorsqu’elle voyait la compétition entre ses seins pour savoir lequel allait rejoindre ses genoux le premier!… Avec Jacques Brel elle aurait bien pu chanter «Quand on n’a que l’humour…»

Une attitude à rechoisir périodiquement — notamment quand apparaissent des symptômes nouveaux: trous de mémoire, moindre maîtrise de certaines fonctions corporelles… Ou quand certains événements viennent au gros crayon marquer des virages dans notre vie — par exemple un accident ou une maladie qui affecte notre mobilité, un deuil qui nous met en solitude, une séparation qui nous laisse en tristesse…

J’ai parlé de symptômes nouveaux liés à l’âge. D’autres font surface aujourd’hui pour nous tous,  quel que soit notre âge: ces attitudes qu’on a laissées se figer en nous avec le temps, jusqu’à devenir des automatismes en panne de sens, ou même des dépendances. Plus qu’avant ces pollutions frappent à notre porte pour être nommées et pardonnées, puis nettoyées — accompagnant un rendez-vous incontournable : notre montée de conscience personnelle et planétaire.
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(1) https://www.journaldemontreal.com/2018/11/12/etes-vous-fluides

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